William Blake
Planche 10 du Livre de Job
Il faut du temps pour pénétrer la cosmogonie de Blake ; longtemps, je n'ai pas perçu la résonance entre la distinction monde naturel / monde de la Nature (Patočka) et la Nature chez Blake comme création Urizénienne et donc mauvaise (quoique promise, comme le reste, à la rédemption) ; le monde de Beulah n'est ni la Nature ni le monde éternel de ce qui est, plus exactement, il n'est pas toute la Nature mais une part de celle-ci, fragile, privilégiée et d'accès rare, qui ouvre à la Vision. J'ai longtemps raté cela.
Mais comment peut-on lire Blake, au sens le plus "physique" du terme ; comment, sans le trahir, lire dans un livre, pire encore, sur écran, les œuvres d'un poète-peintre-graveur qui de son temps déjà menait la critique de la Technique (magie d'Urizen) et mettait ses actes en conformité avec ses pensées au point de refuser l'imprimerie et de passer par la gravure (images et textes, d'ailleurs intimement mêlés) pour diffuser ses œuvres ?
(Sur Blake, voir Henri Lemaître, William Blake - Vision et Poésie, Corti, 1985)