mercredi 23 mars 2016

Au-delà des montagnes -- Jia Zhang-ke




Où l'on retrouve dès le début l'atmosphère prenante de Platform , ce moment de bascule à la fois personnel, social et politique saisi au millimètre qui cette fois dépasse Fenyang, dépasse la Chine et s'étend lentement à l'échelle de continents entiers, de plusieurs générations et sur vingt-cinq ans ; à ces dimensions, on pourrait craindre un excès de schématisme, il n'en est rien et tout est tenu en parfait équilibre par le jeu des acteurs avec au premier rang bien sûr Zhao Tao qui fait défiler vingt-cinq ans d'existence.

Jia Zhang-ke a le don des images finales ; ici, il s'est surpassé. La seule référence qui me vient à l'esprit, c'est le final de Mourir comme un homme ; rien à voir, ni formellement ni par le propos, mais tout à voir dans la gratitude qu'elle suscite en moi, celle de faire éclore une empathie pure qu'on quitte à regret quand la lumière se rallume. 




Au-delà des montagnes est un vilain titre qui ne correspond à rien ; le film avait concouru à Cannes sous le titre Mountains may depart qui est une référence directe à Isaïe 54:10 :

For the mountains shall depart, and the hills be removed; but my kindness shall not depart from thee, neither shall the covenant of my peace be removed, saith the LORD that hath mercy on thee. 
(King James Version)

Même si les montagnes s’écartaient, si les collines s’ébranlaient, ma fidélité ne s’écarterait pas de toi, mon alliance de paix ne serait pas ébranlée, – dit le Seigneur, qui te montre sa tendresse.  
(Attention : Toute reproduction d'extraits de la Bible de la liturgie ou des lectionnaires sur Internet (sites de diocèses, de paroisses, ou autres sites chrétiens) nécessite la mention légale in fine : "Copyright AELF - Paris - 1980 - Tous droits réservés" ... pffff ...)

Il est probable que la référence est encore vivante aux oreilles anglophones (c'est quand même un des versets les plus connus de la Bible, du moins le début et le sens général) ; rien d'équivalent aux oreilles francophones qui seraient sans doute bien en peine de se remémorer l'extrait sous copyright, mais était-ce une raison pour cochonner le boulot ? La terre peut bien s'écrouler, remplaçant cavalièrement Isaïe par Edith Piaf, cela m'aurait bien plu.