Zähle die Mandeln,
zähle, was bitter war und dich wachhielt,
zähl mich dazu:
Ich suchte dein Aug, als du’s aufschlugst und niemand dich ansah,
ich spann jenen heimlichen Faden,
an dem der Tau, den du dachtest,
hinunterglitt zu den Krügen,
die ein Spruch, der zu niemandes Herz fand, behütet.
Dort erst tratest du ganz in den Namen, der dein ist,
schrittest du sicheren Fußes zu dir,
schwangen die Hämmer frei im Glockenstuhl deines Schweigens,
stieß das Erlauschte zu dir,
legte das Tote den Arm auch um dich,
und ihr ginget selbdritt durch den Abend.
Mache mich bitter.
Zähle mich zu den Mandeln.
Paul Celan, Mohn und Gedächtnis
© 1952 Deutsche Verlags-Anstalt, München
In der Verlagsgruppe Random House GmbH
Compte les amandes,
compte ce qui était amer et t’a tenu en éveil,
compte-moi au nombre de tout cela :
je cherchais ton œil quand tu l’as ouvert et que personne
ne te regardait,
j’ai tourné ce fil secret
sur lequel la rosée que tu pensais
a glissé en bas jusqu’aux cruches
que protège une formule qui n’a trouvé le cœur de personne.
C’est là-bas seulement que tu es entré tout entier dans le
nom qui est le tien,
que tu as marché d’un pied sûr vers toi-même,
que les marteaux se sont balancés librement dans le beffroi de ton silence,
que le tout juste Entendu est soudain venu jusqu’à toi,
que le déjà-mort t’a aussi entouré de son bras,
et vous êtes allés trois en un dans le soir.
Rends-moi amer.
Compte-moi au nombre des amandes.
traduction Jean-Pierre Lefebvre
© Editions GALLIMARD, 1998
Collection « Poésie Gallimard »
24/10/2010
Une piste de lecture, parmi d'autres, pour ces "amandes" qui abondent dans la poésie de Paul Celan : en allemand, tronc d'amandier se dit Mandelstam ...
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