vendredi 1 janvier 2010

To -- Adam Zagajewski


To, co tak ciąży
i pcha w dół,
to, co boli jak ból
i pali jak policzek,
to może być kamień
lub kotwica.


Cela

Cela, si prégnant
et qui tire vers les profondeurs,
cela, qui blesse comme une douleur
et brûle comme une gifle,
ce peut être une pierre
ou bien une ancre.


Une pierre ou bien une ancre ... quelle meilleure image pour ce que j'essayais de dire à propos d'identité et d'homéostase prédictive ?

Un poème qui en appelle un autre, je ne saurais exactement dire pourquoi (ok, il y est aussi question d'ancre mais cela ne suffit pas) :


Lightenings viii

The annals say: when the monks of Clonmacnoise
Were all at prayers inside the oratory
A ship appeared above them in the air.

The anchor dragged along behind so deep
It hooked itself into the altar rails
And then, as the big hull rocked to a standstill,

A crewman shinned and grappled down the rope
And struggled to release it. But in vain.
'This man can't bear our life here and will drown,'

The abbot said, 'unless we help him.' So
They did, the freed ship sailed, and the man climbed back
Out of the marvellous as he had known it.


Seamus Heaney – in "Seeing Things", 1991



Illuminations viii


Les annales rapportent: comme les moines de Clonmacnoise
Etaient tous en prière dans l'oratoire
Un navire apparut au-dessus d'eux dans les airs.

L'ancre trainait derrière si profondément
Qu'elle se prit au balustre d'autel
Et là, comme la grande coque roulait à l'arrêt,

Un marin parut, resplendissant, et descendit le long de la corde
Et lutta pour la dégager. Mais en vain.
'Ce marin ne peut supporter notre vie et se noiera'

Dit l'abbé, 'à moins que nous ne l'aidions'. Ainsi
Firent-ils, le navire libéré s'éloigna et le marin remonta
Hors du merveilleux qu'il venait de connaître.

Curieux comme ces deux poèmes se répondent dans mon esprit et comme l'origine de ce lien reste caché ; sans doute est-il caché dans ce motif étrange (mais la poésie de Seamus Heaney regorge de ces visions puissantes qui ne se laissent pas réduire à un sens univoque) de l'ancre que je vois apparaître deux fois : celle du céleste bateau, bien sûr, mais aussi l'autel terrestre (symbole de notre ancre spirituelle) où elle reste accrochée, mettant en péril le vaisseau fabuleux comme le ferait une pierre trop lourde. Il y a là, caché (peut être dans ma mauvaise foi, ou ma mauvaise lecture, seulement !), un motif troublant sur les rapports entre religion et spiritualité.

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