W zaplombowanych wagonach
jadą krajem imiona,
a dokąd tak jechać będą,
a czy kiedy wysiędą,
nie pytajcie, nie powiem, nie wiem.
Imię Natan bije pięścią w ścianę,
imię Izaak śpiewa obłąkane,
imię Sara wody woła dla imienia
Aaron, które umiera z pragnienia.
Nie skacz w biegu, imię Dawida.
Tyś jest imię skazujące na klęskę,
nie dawane nikomu, bez domu,
do noszenia w tym kraju zbyt ciężkie.
Syn niech imię słowiańskie ma,
bo tu liczą włosy na głowie,
bo tu dzielą dobro od zła
wedle imion i kroju powiek.
Nie skacz w biegu. Syn będzie Lech.
Nie skacz w biegu. Jeszcze nie pora.
Nie skacz. Noc się rozlega jak śmiech
i przedrzeźnia kół stukanie na torach.
Chmura z ludźmi nad krajem szła,
z dużej chmury mały deszcze, jedna łza,
mały deszcze, jedna łza, suchy czas.
Tory wiodą czarny las.
Tak to, tak, stuka koło. Las bez polan.
Tak to, tak. Lasem jedzie transport wołań.
Tak to, tak. Obudzona w nocy słyszę
tak to, tak, łomotanie ciszy w ciszę.
Encore
Dans les wagons plombés
des noms traversent le pays,
mais où s'en vont-ils ainsi
et quand descendront-ils enfin,
cela ne me le demandez point,
je ne le dirai pas, n'en sais rien.
Le nom Nathan frappe sur la portière,
le nom Isaac, dément, se met à chanter,
le nom Sarah implore de l'eau pour le nom
Aaron qui dès lors à la soif succombe.
Ne saute pas du train en marche, nom David,
nom qui condamne à être vaincu
et que nul ne veut plus donner, nom sans abri,
trop lourd à porter dans ce pays.
Que mon fils ait un nom bien slave
car ici on compte chaque cheveu,
car ici on distingue le bien du mal
suivant le nom et la coupe des yeux.
Ne saute pas du train. Miroslaw sera le fils.
Ne saute pas. Il n'est pas encore temps.
Ne saute pas. La nuit retentit comme le rire
et singe le grincement des roues sur les rails.
Un nuage d'hommes a couvert le pays,
du grand nuage une petite pluie,
une petite pluie, une larme, un temps sec.
Les rails mènent dans un bois noir.
C'est comme ça, crie la roue. Le bois est sans clairières.
Comme ça, comme ça. Un transport d'appels s'en va.
Comme ça, comme ça. Réveillée la nuit, j'entends
les coups sourds du silence dans le silence.
Wisława Szymborska, Dans le fleuve d’Héraclite,
traduit par Lucienne Rey,
Maison de la Poésie Nord-Pas de Calais, 1995
Belle traduction ; pour la dernière strophe, je ne crois pas qu'on puisse laisser de côté le dernier tak to, tak ; cela pourrait donner quelque chose comme :
Comm'ça, c'est comm'ça, crie la roue. Forêt sans clairière.
Comm'ça, c'est comm'ça, un convoi de cris file vers la forêt.
Comm'ça, c'est comm'ça, la nuit, éveillée, j'entends
comm'ça, c'est comm'ça, le martèlement du silence dans le silence.
Aussi difficile, Chmura z ludźmi nad krajem szła ... ; ce vers-là est un de ceux qu'on retient immédiatement, jumeau du dann habt ihr ein Grab in den Wolken da liegt man nicht eng dans Todesfuge de Paul Celan. Pour essayer de conserver le parallélisme entre les deux premiers vers, en espérant que le sens s'y retrouve :
Des hommes, un nuage, qui a recouvert le pays,
du grand nuage, une petite pluie, juste une larme,
une petite pluie, juste une larme, sécheresse des temps.
Les rails mènent à la forêt noire.
Également, j'ai un peu de mal à saisir la raison de la substitution de Lech par Miroslaw ... crainte d'une interprétation aussi erronée que moustachue ? Szymborska est au-dessus de cela !
04/12/2011
Tant qu'on y est, une traduction anglaise, par Magnus Jan Krynski (1922-1989), extraite de son receuil de traductions de Wisława Szymborska,
Sounds Feelings Thoughts, (Lockert Library of Poetry) :
Still
In sealed box cars travel
names across the land,
and how far they will travel so,
and will they ever get out,
don't ask, I won't say, I don't know.
The name Nathan strikes fist against wall,
the name Isaac, demented, sings,
the name Sarah calls out for water
for the name Aaron that's dying of thirst.
Don't jump while it's moving, name David.
You're a name that dooms to defeat,
given to no one, and homeless,
too heavy to bear in this land.
Let your son have a Slavic name,
for here they count hairs on the head,
for here they tell good from evil
by names and by eyelids' shape.
Don't jump while it's moving. Your son will be Lech.
Don't jump while it's moving. Not time yet.
Don't jump. The night echoes like laughter
mocking clatter of wheels upon tracks.
A cloud made of people moved over the land,
a big cloud gives a small rain, one tear,
a small rain-one tear, a dry season.
Tracks lead off into black forest.
Cor-rect, cor-rect clicks the wheel. Gladeless forest.
Cor-rect, cor-rect. Through the forest a convoy of clamors.
Cor-rect, cor-rect. Awakened in the night I hear
cor-rect, cor-rect, crash of silence on silence.
Enfin, à propos de traduction, good, very good
news :
Clare Cavanagh and Stanisław Barańczak are this year’s recipients of the ‘Found in Translation’ award for an English language version of the poetry of Nobel prize for literature winner Wisława Szymborska.
Rien de plus mérité ; leur travail autour de Szymborska est exemplaire à tous les points de vue.