avec l'indifférence des vagues-lames
coupant les racines des villes
dans un feuillage sonore
ville échoue sans cesse je m'arrête
à quelques vagues du bas de la page
quitte le cahier
et toutes les villes déliées
désirant prendre la mer
où vas-tu dans la ville arrêtée
île prise au piège de la presqu'île
(in Presque v’île, poèmes, Ed. Caractères, Paris, 2009)
Depuis des années, Marlena Braester publie les poèmes de ses recueils -- parfois bien avant leur parution en recueil -- ici.
Elle fait partie de ces voix personnelles qui marquent si profondément à la première rencontre qu'on appréhende un peu la déception qui naîtrait inévitablement d'une plus longue fréquentation : crainte infondée ; à chaque nouvelle lecture, c'est le saisissement original qui revient !
Sur ce site, elle collecte aussi des textes d'autres auteurs qui seraient autrement très difficiles à trouver, comme cette étude sur Paul Celan ou celle-ci sur Rimbaud et Fondane.
Tiens, curieusement, comme Fondane, elle est née à Iaşi (qu'elle écrit Jassy selon l'orthographe allemande ; c'est à n'y rien comprendre !).
En passant, à propos de Fondane :
"J'appelle Idée tout ce qui prétend à la certitude unique, à l'infaillibilité, à l'autorité, tout ce qui commande et contraint, tout ce qui opprime et tue, tout ce qui définit la vérité une fois pour toutes, la vérité unique, immuable, interdit le doute, la recherche, l'abstention, soumet les exceptions à la majorité, fait juger l'anormal par le normal, l'individu par la foule, réduit l'être vivant, mouvant, à une formule morte, stable, et use, abuse, du principe de contradiction pour rejeter de la société de gré ou de force... Celui qui souffre et qui s'est révolté."
Benjamin Fondane in Rimbaud le voyou (Denoël et Steele, 1933 ; réédité chez Plasma en 1979 puis aux éditions Complexes en 1990 et, malgré tout, apparemment épuisé)