Roman Jakobson
La génération qui a gaspillé ses poètes
Allia
"Dans quelques dizaines d'années on nous appellera sans bienveillance des gens du millénaire passé. Nous avions seulement des chants captivants qui parlaient du futur, et tout à coup ces chants, sortis de la dynamique du présent, sont transformés en faits d'histoire littéraire. Maintenant que les chantres ont été tués, les chansons trainées au musée et épinglées sur le passé, la génération actuelle se sent encore plus ruinée, plus abandonnée, cette génération qui n'a pas, au sens le plus authentique du mot, la parole."
Texte superbe et mélancolique autour de Maïakovski (1894-1930), publié en 1931 par Jakobson dont on oublie souvent qu'il était russe et qu'il fut l'ami de Maïakovski.
Même épinglée sur le passé, la parole de Maïakovski résiste et continue de parler au futur:
Canailles d'anges !
Au paradis l'un contre l'autre serrez-vous !
Hérissez vos plumes d'effroi !
Toi l'imbibé d'encens je vais te fendre
d'ici jusqu'à la terre de l'Alaska !
Laissez-moi !
Vous ne pourrez pas m'arrêter.
Soit que je mente
soit qu'à mentir je dise vrai,
impossible d'être plus calme.
Regardez
on a de nouveau décapité les étoiles
et cette boucherie ensanglante le ciel !
Eh, vous !
Le ciel !
Chapeau bas,
Je m'avance !
Rien que le silence.
L'univers dort,
il a posé sur sa patte
une immense oreille fourmillante d'étoiles.
(Vladimir Maïakovski, final du Nuage en pantalon (1914-1915), traduit par Charles Dobzynski, Le Temps des Cerises)
Maïakovski, que Marina Tsvetaeva avait surnommé, réminiscence du "surhomme au pas de colombe" de Nietzsche ?, "archange poids lourd au pas pesant":
Allia
"Dans quelques dizaines d'années on nous appellera sans bienveillance des gens du millénaire passé. Nous avions seulement des chants captivants qui parlaient du futur, et tout à coup ces chants, sortis de la dynamique du présent, sont transformés en faits d'histoire littéraire. Maintenant que les chantres ont été tués, les chansons trainées au musée et épinglées sur le passé, la génération actuelle se sent encore plus ruinée, plus abandonnée, cette génération qui n'a pas, au sens le plus authentique du mot, la parole."
Texte superbe et mélancolique autour de Maïakovski (1894-1930), publié en 1931 par Jakobson dont on oublie souvent qu'il était russe et qu'il fut l'ami de Maïakovski.
Même épinglée sur le passé, la parole de Maïakovski résiste et continue de parler au futur:
Canailles d'anges !
Au paradis l'un contre l'autre serrez-vous !
Hérissez vos plumes d'effroi !
Toi l'imbibé d'encens je vais te fendre
d'ici jusqu'à la terre de l'Alaska !
Laissez-moi !
Vous ne pourrez pas m'arrêter.
Soit que je mente
soit qu'à mentir je dise vrai,
impossible d'être plus calme.
Regardez
on a de nouveau décapité les étoiles
et cette boucherie ensanglante le ciel !
Eh, vous !
Le ciel !
Chapeau bas,
Je m'avance !
Rien que le silence.
L'univers dort,
il a posé sur sa patte
une immense oreille fourmillante d'étoiles.
(Vladimir Maïakovski, final du Nuage en pantalon (1914-1915), traduit par Charles Dobzynski, Le Temps des Cerises)
Maïakovski, que Marina Tsvetaeva avait surnommé, réminiscence du "surhomme au pas de colombe" de Nietzsche ?, "archange poids lourd au pas pesant":
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